Le Parlement européen sabote la loi contre la déforestation
Communiqué publié le 14 novembre 2024, dénonçant le sabotage de la loi contre la déforestation lors du vote de ce jour au Parlement européen.
Bruxelles, le 14 novembre 2024. Le Parlement européen vient de voter 10 amendements qui remettent en cause l’ensemble du fonctionnement de cette loi historique, qui devait s’appliquer le 30 décembre prochain.
3 modifications substantielles ont été adoptées par les députés ce matin :
- Une exemption pour les pays considérés comme à risque nul : les produits provenant de ces pays pourraient être mis sur le marché européen sans aucune information sur leur origine, et sans que les entreprises n’aient à s’assurer qu’ils apportent des garanties de non-déforestation, non dégradation des forêts et respect des droits humains.
- Un délai de 6 mois entre la mise à disposition par la Commission européenne des outils nécessaires à sa mise en œuvre et la date d’application de la loi.
- Le report d’un an de la date d’application, initialement prévue pour le 30 décembre prochain.
Selon les critères retenus, 134 pays seraient considérés à risque nul comme la Russie ou la Chine par exemple, dont les forêts disparaissent à un rythme alarmant (respectivement 83 millions et 12 millions d’hectares déforestés depuis 2001) mais aussi la quasi-totalité des pays européens qui connaissent pourtant un important taux de dégradation forestière.
La création d’une catégorie de pays à risque nul entraine un risque de « blanchiment » des produits. En effet, pour les entreprises étant exemptées de fournir les données sur l’origine de leurs produits, il suffira de faire transiter des marchandises provenant de zones à risque par des pays à risque nul pour échapper à la loi.
« Il s’agit d’une faille majeure qui sabote l’ensemble du texte, qui deviendra incroyablement facile à contourner. C’est déjà la dynamique qui a été constatée suite à l’adoption du règlement européen contre le bois illégal » explique Klervi Le Guenic, chargée de campagne au sein de Canopée.
De plus, le classement de pays à risque nul ou non est également un sujet très sensible. Pour des raisons diplomatiques, la Commission européenne pourrait repousser cette publication de manière indéfinie. L’amendement voté permettrait ainsi de ne jamais appliquer la loi.
Un compromis doit maintenant être trouvé avec la position du Conseil et de la Commission européenne. Celui-ci pourrait intervenir dans les prochaines semaines.