Déforestation : la loi européenne passe à côté du problème

C’est la première fois qu’un texte de cette ampleur sur la déforestation est voté : la loi européenne va imposer aux entreprises, pour pouvoir vendre leurs produits, de remonter leur chaîne d’approvisionnement et s’assurer qu’ils n’ont pas contribué à la déforestation. Une avancée, certes, mais contrebalancée par le champ restreint des régions qu’elle va concerner.

Une opportunité manquée

Le soja représente 60% des importations à risque de déforestation de l’Union européenne, importé massivement d’Amérique latine pour nourrir nos animaux d’élevage. Or, au Brésil, en Argentine ou encore au Paraguay, la déforestation ne se concentre pas dans les forêts, mais dans d’autres terres boisées. Cette loi ne permettra donc pas, en l’état, de répondre au principal impact de la consommation européenne sur la déforestation.

« Ce texte, attendu depuis de nombreux mois, est une occasion manquée. Bien que l’initiative soit à saluer, en excluant les terres boisées où se concentre notre impact, elle ne permettra de traiter qu’une petite partie du problème. » explique Klervi Le Guenic, chargée de campagne à Canopée. « La seule chose prévue dans le texte est une évaluation, dans un an, de la possibilité de les y inclure. Mais quand on sait que c’est 10 fois la surface de Paris qui disparaît chaque année dans la savane du Cerrado, cela ne peut pas attendre ! »

Ces écosystèmes, particulièrement menacés, sont pourtant clés pour le climat, la biodiversité, et les communautés locales. La savane du Cerrado au Brésil en particulier, abrite 5% de la biodiversité mondiale, et a déjà disparu de moitié à cause de l’expansion agricole.


Pourtant, dès 2018, la France avait acté son soutien à la protection des écosystèmes naturels dans la Stratégie Nationale de lutte contre la Déforestation Importée. Il était donc attendu que ce point clé soit ardemment défendu dans ces négociations. Grâce à notre mobilisation, nous avons réussi à obtenir que la France prenne officiellement position pour la protection de ces terres. Malheureusement, le soutien de la France est arrivé trop tard, et n’a pas permis d’entraîner assez d’autres pays.